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Le Chargé des programmes du CEFAN présentant le plaidoyer sur le financement de l'éducation

Financement de l’éducation : trois questions essentielles au gouvernement


Elles sont essentiellement axées sur le financement de l’école et l’inclusion effective des enfants en âge de scolarisation.


Pourquoi le Cameroun a du mal à respecter ses engagements de Dakar 2018 et de Londres 2021 de porter la part du budget de l’éducation à au moins 18,5% ? Pourquoi le gouvernement persiste à maintenir les frais exigibles de 7 500 FCFA dans le préscolaire au Cameroun au lieu de les supprimer comme dans le primaire ? Pourquoi l’accès à l’éducation à l’éducation des couches à besoins spécifiques est encore difficile au Cameroun ?

Telles sont les trois principales interrogations posées par la Cameroon Education For All network (CEFAN) lors de la conférence-plaidoyer organisée à l’occasion de la 31e édition de la Journée mondiale des enseignants (JME). Profitant des échanges avec les candidats à l’élection présidentielle au sujet de leurs projets de société en matière d’éducation, l’organisation non gouvernementale de droit camerounais a abordé ces problématiques pour lesquelles elle a multiplié les plaidoyers depuis deux décennies.

Olivier Tankeu, Chargé des programmes au CEFAN a vite fait de revenir sur le contexte, lors de son intervention initiale à cette conférence. Un contexte marqué par l’élection présidentielle du 12 octobre 2025 et les revendications des enseignants depuis 2022. Ce qui a poussé le CEFAN à mettre un accent sur la qualité de l’éducation au Cameroun. Il était non seulement question de suivre le volet éducatif de chacun des candidats à la Présidentielle et les engagements gouvernementaux relatifs aux revendications des enseignants, mais aussi et surtout de présenter les attentes de la société civile de l’éducation vis-à-vis des prochains gouvernants.

Augmenter le financement de l’éducation

A propos justement des plaidoyers et attentes, ils sont articulés autour des trois questions préalablement posées. S’agissant du financement de l’éducation, rappelons que le gouvernement s’était engagé, à Dakar en 2018 puis à Londres en 2021, de porter la part du budget de l’éducation à au moins 18,5% de l’enveloppe globale.

L’on est encore loin de cet objectif, bien qu’au cours des deux derniers exercices budgétaires, l’on ait observé une légère hausse, soit 13,60% en 2023 et 14,66% en 2024. Le CEFAN souligne par ailleurs que l’engagement gouvernemental est lui-même en dessous de l’objectif de développement durable n°4 (ODD4) qui est « porter à au moins 20% des dépenses publiques dans le secteur de l’éducation et de la formation ».

Gratuité au préscolaire

Le plaidoyer du CEFAN porte également sur la gratuité au préscolaire. Certaines études menées par des organisations indépendantes ou des institutions étatiques montrent qu’au Cameroun, seulement 4 enfants sur 10 ont accès au préscolaire. « Seulement environ 600 000 enfants de 04 à 05 ans sur plus de 1 500 000 attendus ont accès dans le préscolaire au Cameroun. Soit un taux brut de préscolarisation de 40 % », précise Olivier Tankeu. La problématique coule donc de source : pourquoi près de 900 000 autres enfants n’accèdent pas dans le préscolaire au Cameroun ? Et la principale réponse à cette question venant des parents est : « l’école maternelle coûte chère au Cameroun et à cause de cela, on préfère attendre l’âge de 6 ans pour envoyer l’enfant au primaire qui est gratuit ».

Le troisième et dernier plaidoyer porte sur l’éducation inclusive. Celle-ci concerne les enfants vivant avec un handicap, les enfants issus des minorités autochtones, les enfants réfugiés ou déplacés internes, les enfants de la rue et du monde rural, etc. En effet, le constat est que si des mesures spécifiques sont prises pour faciliter l’accès à l’éducation à ces couches à besoins spécifiques, leur impact reste encore très faible. De milliers d’enfants à travers le pays restant encore exclus du système éducatif, soit à cause d’infrastructures inadaptées à leur situation, soit au manque de personnels qualifiés pour les prendre en charge, soit encore à la non-intégration de leurs spécificités dans les curricula.

Des propositions concrètes

La CEFAN estime pourtant qu’il existe de nombreuses solutions pour inverser ces tendances qui font du système éducatif un malade au seuil de l’agonie. Et pour anticiper sur la question des prochains gouvernants de savoir comment y parvenir, l’ONG a des suggestions. Outre l’augmentation du budget de l’éducation conformément aux normes internationales auxquelles le Cameroun a souscrit, les ressources peuvent être mobilisées à travers une taxation des firmes multinationales ou sur des produits manufacturés et agroalimentaires.

Il serait également possible d’imputer l’exploitation des activités en lien avec les ressources naturelles dont le Cameroun regorge. La contribution des travailleurs du public et du privé à hauteur de 1% de salaire mensuel serait également une piste à explorer. Dans ce cas, il s’agirait alors d’introduire dans les charges sociale et fiscale du travailleur la redevance scolaire. Enfin, on pourrait capitaliser la responsabilité sociale des entreprises. Les pistes sont en tout cas nombreuses…